Vie et oeuvre d'Achilles De Maertelaere - Bentos

Achilles De Maertelaere est né à Gand (B) le 5 septembre 1882. Il est le fils de Charles (Carolus Ludovicus) De Maertelaere (1856-1940) et de Pélagie Van Laecke (1856-1931). Il a un frère aîné Polydore (1881-1935), un frère cadet  Ernest (1886-?) et une soeur cadette Sylvie (1892-1989). Un cinquième enfant dans la famille, Sylvain, meurt peu de temps après sa naissance en 1890.

Achilles De Maertelaere ne s'est jamais marié et n'a pas eu d'enfants. Il a vécu avec ses parents, jusqu'en 1931. Lorsque sa mère décède, il va habiter avec son père chez sa soeur Sylvie, dans la rue au Prince (maintenant rue Mirabello), plus tard dans un appartement à la Plaine des Héros (Heldenplein) à Malem, jusqu'à sa mort le 24 avril 1964.

Il a installé son atelier dans la rue de Provendières, au numéro 25, dans l' Ancien Béguinage Sainte-Elisabeth. Il le gardera jusqu'en 1960-1961, lorsque l'âge aidant, il ne peut plus travailler à ses tableaux.

On trouve dans plusieurs contributions des Ghendtsche Tydinghen l'explication pourquoi Achille De Maertelaere a finalement choisi le pseudonyme de Achilles Bentos: dans l'ancien béguinage vivait un autre peintre, un peu plus agé, Edmond De Maertelaere (1876-1938), ce qui prêtait à confusion. Achilles a alors choisi d'adopter le nom, légèrement adapté, d'un vieil ami, Henri Frans dit Bento, un artiste de cirque qui posait parfois pour lui et qu'il aurait connu dans une association sportive. Achilles De Maertelaere fait pour Henri Frans dit Bento les décorations murales du café (Café Bentos) que celui-ci ouvre dans la rue aux Agneaux (Lammerstraat), vers 1915. Achilles peindra encore un portrait de l'homme et de sa femme: sur l'un, Henrietje, comme il l'appelait, lit le journal, sur l'autre, sa femme préprare le hochepot. Les deux tableaux pendaient, jusqu'au moins la fin de seconde guerre mondiale, dans un deuxième café que Bento avait ouvert au coin de la rue de Wondelgem et de l'avenue Philippe Van Cleef. Ce café existe encore toujours.

Au début de sa carrière, Achilles De Maertelaere signe ses oeuvres de son vrai nom 'Ach. De Maertelaere' (parfois aussi Demaertelaere). Il fera cela jusqu'à la fin de la première guerre mondiale: lors de l'exposition universelle de 1913, par exemple, il signe encore de son vrai nom. Lors des expositions de Kunst en Kennis (Art et Connaissance) de 1912 et 1916 également, alors que pour l'expostion de 1921 apparaît son nom d'artiste Achilles Bentos.

Tout change donc pendant ou peu après la guerre: dès 1920 il signe de son pseudonyme. En effet, sur les deux monuments aux morts, inaugurés en 1921, on trouve la signature "Ach. Bentos D.M." et "Ach. Bentos". Par la suite, il utilisera presque exclusivement son pseudonyme, parfois encore avec la terminale D.M. On trouve également quelques oeuvres qu'il signe "Ahileo De Maertelaere", en Esperanto.

Selon certaines sources, Achilles De Maertelaere aurait eu une formation d'orfèvre. Ce dont on est sûr, c'est qu'il a suivi les cours de l'Académie royale des Beaux-Arts de Gand à partir de 1894-1895. Il y obtient plusieurs premiers prix. Il finira ses études avec succès, avec deux magnifiques dessins qui lui donneront le premier prix de l'Académie en 1903-1904 (Travaux d' Académie). En 1912, il participe au concours de sculpture du Prix de Rome. 75 jeunes artistes tentent leur chance cette année-là. Achilles sera sélectionné parmi les six candidats nominés et participe à l'épreuve finale, mais sans succès. C'est Arthur Dupon qui obtiendra le prix. D'autres jeunes artistes connus ont particpé au concours cette même année, comme Eugène Canneel, Joseph Cantré (qui a crée le monument à Edouard Anseele de l'avenue Franklin Roosevelt), Alfred Courtens, Oscar De Clerck, Oscar Jespers, Leon Sarteel ou Victor Voets.

Dessins préparatoires pour une peinture murale dans la Maison du Peuple (Ons Huis) au Marché du Vendredi à Gand - 1904
Dessins préparatoires pour une peinture murale dans la Maison du Peuple (Ons Huis) au Marché du Vendredi à Gand - 1904

Pendant sa formation à l'Académie, il est l'élève de Jules E. Van Biesbroeck et surtout de son fils Jules P. jr. C'est sans doute à l'influence de ce dernier que l'on doit qu'Achilles De Maertelaere aqit été attiré par le mouvement socialiste à Gand (Oeuvre engagée). Il crée ainsi avant la première guerre mondiale des toiles monumentales pour la Maison du Peuple Ons Huis à Gand (le 'Bond Moyson') ou pour celle de Wetteren ("De Zon", le Soleil). Il dessine plusieurs affiches pour des évènements socialistes, comme l'inauguration des magasins de la coopérative Vooruit en 1899. Il est également l'auteur d'un portrait du politicien socialiste Edouard Anseele (1856-1938), à l'occasion de 75ème anniversaire en 1931. En 1934, il crée le monument funéraire du syndicaliste gantois Jan Samijn.

La cloche sonne 5 heures! Mi-endormis, ils partent à l'usine - 1905 (photo MIAT)
La cloche sonne 5 heures! Mi-endormis, ils partent à l'usine - 1905 (photo MIAT)

Le tableau le plus connu est sans aucun doute le grand panneau qui avait été créé par Achilles De Maertelaere pour une manifestation à Bruxelles en 1905 et qui a été portée lors d'autres cortèges du 1er mai à Gand. Le tableau, qui porte le titre 'De klok slaat 5 ure! Half slapend gaan zij naar 't fabriek" (La cloche sonne 5 heures! Encore ensommeillés, ils partent à l'usine), est devenu l'image-icône de la lutte sociale des ouvriers du textile à Gand. Lors de la fête du centenaire de la création du parti socialiste à Gand, le panneau a été, avec cinq autres, reproduit en format poster. Aujourd'hui, il pend aux cimaises du Centre de vacances Floréal à Blankenberge.

Tout récemment encore, cette icône de la lutte sociale et de la lutte contre le travail des enfants à Gand, a fait l'objet d'un article de Paule Verbruggen.

Allégorie de l'industrie textile - 1913
Allégorie de l'industrie textile - 1913

Lors de l'exposition universelle de Gand, en 1913, Achilles De Maertelaere participe avec l'équipe des Van Biesbrouck. Il peint entre autre une grande toile appelée "Allégorie de l'industrie textile" qui sera exposée dans le vestibule et fait maintenant partie des collections du Musée de l'Industrie à Gand. Il créera aussi une affiche pour le 1er congrès international socialiste d'éducation physique.

Le portrait de Zamenhof à Vienne
Le portrait de Zamenhof à Vienne

Achilles De Maertelaere, sans doute influencé en cela par ses idées socialistes, était un internationaliste. Il a appris l' Espéranto et signe plusieurs de ses oeuvres de son nom en Espéranto. Il peindra même plusieurs portraits de Ludwig L. Zamenhof (1851-1978), le fondateur de ce mouvement. Il existe au moins trois tableaux de Zamenhof par De Maertelaere. Deux sont propirété du musée de l'Espéranto de Vienne, un troisième portrait à la sanguine fait partie des archives de AMSAB.

Achilles De Maertelaere était de toute évidence un artiste avec une formation et un style très académique. Ses thèmes (portraits, nus, scènes mythologiques, etc.) sont en tous points classiques. Il est plusieurs fois présent lors d'expositions à Gand, notamment lors des triennales du Salon de Gand (entre autres en 1922, 1925 et 1937) et participe également aux expositions de Kunst & Kennis (Art et Connaissance), sous le nom d'Achilles De Maertelaere en 1912 et 1916, sous celui d'Achilles Bentos en 1921, 1923, 1929, 1936 et 1937. Lors d'une expositon artistique de "Geluk in 't werk" (Bonheur dans le travail), de nombreux tableaux sont présentés. Cette association, parfois aussi connue comme une société populaire, comptait e.a. une section Gymnastique, à laquelle Achilles participait, dit-on.

Il sera en 1922 l'un des membres fondateurs de la Fédération Nationale des Artistes-Peintres et Sculpteurs de Belgique, créée au 1er octobre 1922 à Gand.

Achilles De Maertelaere devient en janvier 1940 chargé de cours à l'Académie des Beaux-Arts d'Eeklo. Il y enseigne la sculpture en cours du soir et la sculpture et la peinture le dimanche. Il prend sa retraite en septembre 1951. Il a alors 68 ans.

Achilles De Maertelaere meurt le 24 avril 1964 à Malem (Gent), chez sa soeur. Il est agé de 82 ans. Plusieurs articles paraissent dans les journaux gantois, dont un dans Vooruit.